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Amer beton film streaming regarder en ligne 1080p

  • Amer Béton
  • (Tekkonkinkreet)
  • Japon
  • -
  • 2006
  • Réalisation. Michael Arias
  • Scénario. Anthony Weintraub
  • d'après. le manga Amer Béton
  • de. Taiyô Matsumoto
  • Montage. Mutsumi Takemiya
  • Musique. Plaid
  • Producteur(s). Eiko Tanaka, Eiichi Kamagata, Masao Teshima, Fumio Ueda
  • Interprétation. Kazunari Ninomiya (Noir), Yû Aoi (Shiro), Yûsuke Iseya (Kimura), Min Tanaka (Le Rat), Masahiro Motoki (Le Serpent).
  • Durée. 1h51
  • voir la bande annonce

L'éveil des sens, par Vincent Avenel

Amer Béton

Tekkonkinkreet

Après trois ans et demi de travail, le réalisateur Michael Arias, déjà remarqué sur certains courts dans l’anthologie Animatrix. lance sur grand écran l’adaptation d’un manga renommé, Amer Béton. Splendide, doté d’une mise en scène magnifique et novatrice, audacieux, le film épuise à n’en plus finir le dictionnaire du dithyrambe.

Blanc et Noir sont deux gamins, figures presque mythiques des rues du quartier de la « Ville Trésor ». Connus de tous et depuis un temps bien plus long que ne le laisserait croire leur jeune apparence, ils se posent en défenseurs du quartier contre les intrus tels que Le Rat et son groupe de yakuzas, désireux de transformer l’ancien quartier pittoresque en parc d’attractions. Mais lorsque l’inquiétant Serpent, flanqués de ses aides brutaux et énigmatiques, se pique de les évincer, l’équilibre entre les deux jeunes gens est rompu, l’un tombant dans une catatonie, l’autre se laissant aller à une terrible violence aveugle.

Blanc et Noir, le jour serein et la nuit pleine de dangers, le passé traditionnel contre un futur déshumanisé, la fureur créatrice du feu contre les forces nourricières de l’eau… La dichotomie traditionnelle de la mystique orientale du Ying et du Yang pénètre évidemment tout Amer Béton. à commencer par ses deux protagonistes, l’un, Blanc, étant innocent, rêveur, serein ; l’autre, Noir, violent, impatient, enragé. Comme dans la tradition mystique, les deux ne se repoussent pas, mais se complètent. Les analogies à ces deux principes sont très nombreuses dans le film, mais c’est particulièrement l’opposition entre un passé pétri de tradition mystique et un futur tout entier voué au profit matérialiste qui retient particulièrement l’attention. Ce « conflit de génération » est un thème on ne peut plus actuel dans la société japonaise moderne, où les « anciens » restent fidèles à une tradition shintoïste et aux anciennes manières, et les jeunes se tournent plus volontiers vers un athéisme sombrement concret. Le schisme social est présent à de nombreux niveaux. dans le monde du travail, la carrière des anciens leur réclamait qu’ils se consacrent à un métier seul et unique, tandis que les jeunes, influencés par l’Occident, sont aujourd’hui bien plus polyvalents, sans être cependant experts. Et la dichotomie se répète ainsi à tous les niveaux, comme le cinéma a déjà pu le souligner. Les personnages de yakuzas – le jeune et ambitieux Kimura face au vieux Rat – sont ainsi une figure très présente dans le cinéma de genre japonais, répétant cette opposition de vues incompatibles. Incompatibles. C’est pourtant ce que choisit de mettre en doute Amer Béton. selon la mystique développée dans le film, le passé et le futur doivent se compléter, de la même façon que les styles visuels du passé (les bâtiments de la Ville Trésor) et du futur (la ville – parc de jeu construite par les yakuzas) se complètent dans l’harmonie visuelle que constitue Amer Béton .

Car on parlera ici d’harmonie dans son sens premier, un ensemble de sons (ici visuels) rassemblés pour donner une satisfaction sensorielle. La richesse graphique d’Amer Béton force le respect, et l’on comprend à la précision, à la finesse et à la richesse du trait pourquoi le réalisateur et son équipe ont passé 40 mois de travail intense sur le film. Loin de se limiter à sa splendeur visuelle, le film apporte du sens à ses différents styles, voulus comme autant de langages. la vieille ville, le parc d’attraction, l’étrange et poétique monde onirique de Blanc, le monde magnifique et cauchemardesque du Minotaure (inspiré de Francis Bacon)… Mais le style visuel le plus frappant reste par-dessus tout celui des personnages eux-mêmes. si la ville, l’environnement, changent avec une pertinence et une recherche de sens étourdissantes, les personnages restent les mêmes tout au long du film. Stylisés, simples mais merveilleusement expressifs, ils restent l’aspect le plus étonnant d’Amer Béton. Avoir à sa disposition une technique suffisante pour créer les magnifiques décors du film et pourtant s’astreindre à rendre expressifs des personnages au graphisme sommaire, presque caricatural, témoigne d’une volonté d’inscrire le film dans un réel processus cinématographique, en rendant l’image totalement signifiante. Car Amer Béton est un film au langage manifestement cinématographique (la mise en scène de l’étourdissante première scène, la progression des personnages – richement décrits – basée avant tout sur un développement au fil de l’intrigue, le soin apporté au cadrage, notamment dans la confrontation entre les deux yakuzas, laissent rêveur) mais il est bien plus que cela. Michael Arias a fait sienne l’expression purement graphique de l’animation. Il choisit de se créer un univers expressif propre en jouant, dans la première partie du film, des procédés du cinéma « réel », pour déchirer dans la seconde partie tous les cadres qu’il s’était posés. scénaristiquement, visuellement, cinématographiquement, il inaugure une nouvelle idée de l’utilisation de l’écran de cinéma, avec une maîtrise étourdissante pour un premier film.

Å’uvre inclassable parce qu’elle commence – n’ayons pas peur des mots – une nouvelle ère dans l’expression (cinémato-)graphique, Amer Béton peut se passer de comparatif. L’omniprésence de la mystique du yin et yang est indéniable, mais il serait dommage de s’arrêter à cette simple analyse, tant les niveaux de lectures et de satisfaction artistique et intellectuelle fourmillent dans le film. Mamoru Oshii, Satoshi Kon ont déjà contribué à balayer les idées reçues qui cantonnaient l’animation au rang de sous genre. Amer Béton est une preuve de plus – s’il en fallait encore – que ce média est aussi prégnant artistiquement que son frère plus « tangible ».

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